Ecrire: objectif journalier et motivation

J’en parlais déjà ici, écrire tous les jours est, à mon sens, essentiel pour progresser dans son écriture, et développer cette habitude est facile et gratuit.

Ainsi, se fixer un objectif à atteindre tous les jours est très motivant, et c’est aussi l’un des buts du NaNoWriMo1. Pensez qu’avec un objectif à 500 mots par jour, en écrivant tous les jours de l’année, vous aurez écrit 182,500 mots en un an. Un roman comprend 100,000 à 125,000 mots–bien sûr, on parle là d’habitudes issues du monde papier, et rien ne vous empêche maintenant de publier un ebook de 40,000 ou de 200,000 mots, du moment que cela sert l’histoire.

Avec un objectif aussi petit (500 mots), vous pouvez donc écrire 1,8 roman par an en moyenne. Je trouve cela considérable, surtout que pour ma part, cet objectif de 500 mots représente 20 à 30 minutes, c’est donc un créneau que j’arrive à trouver facilement. Même avec un boulot à plein temps, même avec des gardes.

L’idée ici est bien de fixer cet objectif en fonction de vos limites, qu’elles soient en temps, ou encore en difficultés d’écriture. Car cela fonctionne si l’on ne se met pas en échec. Cela fonctionne grâce au plaisir et à la valorisation d’avoir écrit sa « part journalière ».

Et, du coup, il ne faut pas hésiter à modifier cette limite quand le besoin s’en fait sentir. Je m’en explique avec mon exemple personnel (peut-être que cela servira à quelqu’un).

Mon objectif était fixé à 500 mots, assez bas pour que je sois certain de le remplir, quelles que soient les circonstances. Dans mon métier, les mois d’octobre et novembre sont (beaucoup) plus chargés, j’ai aussi plus de gardes à effectuer (vacances scolaires obligent). Et surtout, j’étais dans la panade du milieu de l’histoire, ce moment apparemment connu, entre deux pics narratifs, où l’histoire avance péniblement et lentement. Et cela à bien fonctionné, me permettant d’écrire tous les jours mes 500 mots, même lorsque l’histoire s’est révélée difficile à accoucher, même si cela ressemblait plus à une lutte qu’autre chose.

Les objectifs d'un projet.

Maintenant, je suis sorti de cette phase difficile (à écrire), et mon histoire file sous mes doigts, je n’en suis presque plus que le témoin. J’ai donc rehaussé mon objectif à 1500 mots par jour, puisque je « lutte » beaucoup moins pour avancer dans mon plan, ce qui me fait avancer beaucoup plus vite vers la fin de mon premier jet2.

Tout ce que je veux dire, c’est ceci: réglez cet objectif journalier de manière à l’accomplir, et adaptez-le en fonction du moment et des besoins. Pas d’un jour à l’autre, pas d’une session à l’autre, mais si, comme moi, vous vous rendez-compte que cet objectif est plus facile à atteindre, par exemple, profitez-en. Et à l’inverse, baissez-le aussi bas que nécessaire pour l’accomplir.

C’est ce qui marche.

  1. Courage, David !
  2. Et aussi: plus j’écris, plus je m’améliore, c’est en forgeant que l’on devient forgeron, etc.

La collecte d’idées pour écrire

Mine de rien, à force de faire des recherches et de m’intéresser aux méthodes employées par les autres, j’ai glané et piqué ça et là certains outils qui me correspondent bien dans mon fonctionnement et m’aident pour l’écriture ou ma créativité en général.

Le plus souvent, ces outils servent à contourner un problème auquel je suis confronté, et récemment, le commentaire d’un lecteur pointait du doigt directement l’un de ces problèmes.

Que faire des idées qui [vous] viennent entre deux temps d’écriture: avoir de quoi les noter ? Essayer de s’en souvenir ?

La réponse est simple, et vous vous y attendez: oui, et oui.

Mais développons un peu plus le sujet.

Un problème de mémoire

L’un des problèmes auquel je suis confronté est la collecte des idées, ou plus précisément le fait que je ne me rappelle pas mes idées.

Vous savez sûrement ce que c’est: à un moment inopiné, mettons, pendant un footing, une idée me traverse l’esprit: idée d’article, développement d’une histoire, d’une structure narrative, vous voyez le topo. Pile au mauvais moment, ou dans la mauvaise situation ; en bref: la situation en question fait que, pour reprendre mon exemple, mon idée s’envole en même temps que mon rythme cardiaque.

La solution parait évidente: il faut noter cette idée au moment même où elle se présente, au moment où je l’ai. J’ai l’air d’enfoncer une porte ouverte ou de sortir une Lapalissade, mais croyez-moi: si je ne note pas ce fragment, il n’en reste rien en quelques minutes.

J’ai donc pris la décision d’avoir à tout moment de quoi consigner ces idées: un carnet et un stylo, mon iPhone, mon iTruc, un ordi du boulot (je m’envoie alors un mail), mon propre MacBook.

Si je reprends la situation du footing, je sais que je ne vais certainement pas transporter mon carnet pendant la course (quelle idée), mais que j’aurais mon iPhone, parce que j’utilise Runkeeper pour suivre mes progrès. Je n’hésite pas à m’arrêter quelques secondes pour noter (le plus souvent une note vocale)1 la chose avant de continuer ma course et le fil de mes pensées.

Un problème de tri

La plupart des bonnes idées nous viennent à l’esprit sous forme de fragments, d’intuitions ou de petites étincelles. Beaucoup de ces idées peuvent traîner ainsi des mois ou des années avant de s’assembler en quelque chose d’utile, le plus souvent par la rencontre avec une autre idée.

Ces petits fragments sont très faciles à oublier. Vous êtes en train de lire cet article, cette petite étincelle clignote au fond de votre tête, et le temps de finir votre lecture, elle a disparu comme une bulle de savon qui éclate en quelques millisecondes.

Et le plus souvent, si jamais vous vous en souvenez, vous n’arrivez rien à en faire (dans l’immédiat), tant qu’elles ne s’insère pas dans un contexte plus large.

Le spark file

L’idée est donc de toutes les noter, les consigner au moment où elles apparaissent, petites étincelles, petites bulles de savon d’idées, et de les collecter ensuite dans un endroit unique.

C’est le spark file, littéralement « fichier à étincelles », et c’est une idée empruntée à Steven Johnson.

En pratique, je note le bout d’idée, l’intuition, quoi que ce soit qui titille mon esprit fugace par le moyen que j’ai à ma disposition. À un moment de la journée (en général, en début de soirée), je reporte ces notes dans un fichier judicieusement appelé « SparkFile », accessible depuis n’importe où (il est sur Dropbox, vous pouvez le mettre sur le nuage qu’il vous plaira). Ce fichier est unique, pour ne pas disperser tout cela au fil de différents carnets Moleskine ou dans DayOne, Evernote ou OneNote ou encore NVAlt. C’est un bête fichier texte, mais c’est toujours le même.

Pas d’effort particulier d’organisation, pas de tag, les entrées sont simplement datées.

Et tous les trois ou quatre mois, je relis tout le fichier.

C’est là le secret, c’est là que c’est efficace, parce que cela me permet de faire des liens, une intuition d’il y a six mois avec un bout d’idée de l’année dernière, etc. Vous voyez l’astuce. Ces fragments s’assemblent et parfois forment carrément un projet ou une structure bien établie pour une histoire.

Certainement, je lis et je relis plusieurs fois des dizaines et des dizaines de ces fragments qui ne me serviront peut-être jamais. Mais de temps à autre, et même plus souvent que ce à quoi je me serais attendu, je sors de ce fichier une belle idée, bien plus aboutie que ces petits fragments évanescents qui m’effleurent au fil de mes journées.

En conclusion

En conclusion, et en guise de réponse, oui, j’ai toujours de quoi noter, et oui, je note ces idées au moment ou je les ai, toutes, sans trier, sans considération aucune, et je les consigne dans un seul et unique endroit accessible depuis n’importe où.

L’astuce est vraiment de me servir de ce fichier, c’est à dire de le relire régulièrement.

  1. Draft est ici d’une grande utilité, puisqu’il me permet de rajouter ma note, datée, directement dans mon fichier SparkFile, vous allez comprendre.

Comment Cory Doctorow fait-il pour être aussi productif ?

Cory Doctorow est un journaliste, écrivain et activiste internet d’origine canadienne. Il vit actuellement à Londres, et c’est l’un des écrivains les plus prolifiques que je connaisse, avec par exemple Fabrice Colin.

Il était l’invité de Glenn Fleishmann lors d’un récent podcast (New Disruptors podcast), durant lequel il a répondu à quelques questions sur sa productivité, notamment: quel est votre secret pour produire autant1 ?

Sur le secret de sa productivité, il répond donc:

  • Dire beaucoup non, c’est-à-dire décider et choisir sur quoi l’on veut travailler
  • Apprendre à écrire dès qu’un moment se présente
  • Avoir un objectif journalier en termes de mots à écrire
  • Savoir s’arrêter au milieu (d’une phrase, d’un paragraphe, une fois le nombre de mots décidé atteint)
  • Choisir un objectif modeste, mais l’atteindre tous les jours
  • Par incidence, écrire tous les jours, donc développer une habitude de l’écriture

D’après Doctorow, développer cette habitude d’écrire tous les jours, et surtout écrire (facilement?) lui est venu à partir du moment où il a réalisé que sa satisfaction avait beaucoup plus à voir avec son système endocrinien et son taux de glucose dans le sang qu’à voir avec les mots qu’il venait d’écrire. Aussi séduisante que peut l’être l’idée de “l’inspiration”, celle-ci n’a probablement rien à voir avec la qualité de votre travail.

Le reste du podcast est plutôt orienté sur la publication online, les ebooks et les questions économiques autour du partage et de la disponibilité de ses écrits online, entre autres choses. Des notes tirées du podcast sont disponibles sur le site de Glenn Fleishmann.

Pour ma part, même si je ne suis pas encore publié, je trouve beaucoup de plaisir dans l’écriture. Et dans l’idée de toujours m’améliorer, il se trouve que j’applique quelques-uns de ces principes.

J’ai un day job, pour nourrir la famille (et parce que ce job est intéressant pour moi), et ce job est assez prenant, impliquant des gardes, des nuits et des déplacements. Tout cela participe du fait que moi non plus, je n’ai pas de cocon tranquille et sans bruits, ni de moment réservé, pour écrire. J’écris, comme Doctorow le faisait à l’époque où il travaillait pour la E.F.F., quand je peux, ce qui implique que je trimballe partout mon mac.

J’essaie également de développer cette habitude (certains diraient ce muscle) de l’écriture, tous les jours, quoiqu’il arrive. Et c’est vrai que cela facilite grandement l’écriture, dans le sens qu’en quelques semaines, il n’est nullement difficile d’atteindre le compte de mots que je me suis fixé.

Une petite différence, cependant: si je crois également qu’il faut s’arrêter au milieu d’une idée ou d’une phrase, parce que cela facilite la reprise de l’écriture le lendemain, j’ai tout de même du mal à avancer vite si je n’ai pas l’idée de ce que je vais écrire un peu en avance.

En gros, cela veut simplement dire que je fais partie des outliners, ceux qui ont du mal à écrire sans plan. D’où mon amour de Scrivener.

Mais plus sur ce sujet lors d’un prochain article.

  1. Ce ne sont que mes notes de “lectures” et pas une fidèle retranscription. Je vous invite à écouter le podcast dans son intégralité.
Retour en haut